Elle sortait. Il était environs 23 heures, ce soir là, alors qu’Agathe quittait son travail. L’envie d’une douche devenait irrépressible, presque autant que celle de dormir une nuit complète. Pourtant, elle savait qu’avec toutes ses responsabilités, ce second plaisir ne lui serait pas accordé avant longtemps.
La jeune femme avait traversé tout l’hôpital, forçant son Don à faire la sourde oreille à tous les sentiments mélangés qu’elle percevait. En fait, elle ne pouvait les ignorer. Quand ils étaient, comme là de simples présences faibles, elle pouvait les réduire à l’état de murmures à peine audibles. Elle se savait étrange. Dans son orphelinat, la Directrice lui avait fait courir les hôpitaux dés son plus jeune âge, en raison de ces sentiments qu’elle percevait. Tous l’avaient cru folle, elle était passée de conférences en conférences, de psychologues en psychologues, et pour qu’on la laisse tranquille, avait feint de ne plus rien entendre, d’être normale. Depuis, elle n’en avait parlé à personne, même si nombre des personnes avec qui elle travaillait avait assisté à d’étranges scènes, comme lorsqu’elle se pliait en deux de douleurs en entrant dans une chambre de malade. Personne n’avait jamais rien dit.
Elle avait enfilé un simple jean et un haut d’un violet pâle. Pourtant, en sortant, elle n’avait pas encore enlevé sa blouse blanche ni son badge qui la présentait comme « Dr. A. Laston, Directrice et Docteur spécialisée aux Blessures par Créatures Vivantes, catégorie Vampires et Loups-Garous. ». Certes, elle avait fait cette spécialisation là, mais aujourd’hui, en raison du manque d’effectifs, elle travaillait dans tous les services, et maîtrisait toutes leurs médecines à la perfection.
Agathe n’aimait pas quitter son hôpital. Elle avait peut-être un chien, une maison, mais ne rentrait pas souvent chez elle, car elle travaillait trop. En quittant sa prison blanche, en traversant la vitre qui les reliait à la rue moldue, elle se sentait devenir impuissante, ne plus rien valoir aux yeux de personne, et ne plus être utile. Pourtant, elle marchait désormais dans la rue, toujours avec sa blouse, et son badge attaché avec soin.
Tournant à droite, elle s’enfonça dans des rues de plus en plus étroites et mal famées. Jusqu’à LA ruelle. Celle où tout allait se passer. En y pénétrant, Agathe ne s’attendait à rien d’autre qu’à l’odeur d’alcool habituelle qui régnait ici chaque soir. Elle avançait à grand pas, pressée de retrouver la lumière des rues plus grandes, plus sûres, mieux réputées, et sa petite maison.
Un homme la plaqua contre le mur. Il glissa les mains à travers sa blouse blanche, cherchant dans ses poches tout ce qui pourrait avoir de la valeur. Agathe se débattit violement mais ne parvint pas à le faire lâcher prise. Au contraire, il referma une main sur son cou, pendant que la jeune directrice essayait tant bien que mal de le faire lâcher, de s’enfuir. Il la retenait. Il arracha un de ses bracelets en argent. Agathe utilisa le peu d’air qu’il lui restait pour crier.
-A L’AIDEEEEEEE !
L’homme anonyme donna un coup de poing dans son ventre, et l’ancienne Serdaigle vit sa vision se brouiller. Qu’on vienne l’aider…